Le rayonnement du Cirque du Soleil
Tout le monde, ou presque, a déjà entendu parler du Cirque du Soleil, voire assisté à l’un de ses fascinants spectacles qui font le tour du monde. Nous nous intéresserons d’abord à cette petite troupe québécoise devenue (très) grande, avant de présenter différents acteurs du domaine, ainsi que d’autres compagnies qui représentent bien ce que l’on entend par « nouveau cirque » québécois : une expérience complète qui fait la part belle aux acrobaties et au jeu d’acteur, et où les animaux n’ont plus leur place (et c’est tant mieux !). Approchez, mesdames et messieurs, venez découvrir le merveilleux monde du cirque à Montréal, et au Québec plus largement, vous ne serez pas déçus.
Première compagnie québécoise de renom international, le Cirque du Soleil voit le jour en 1984 sous l’impulsion de deux artistes de rue, Guy Laliberté et Daniel Gauthier, qui se rencontrent deux ans plus tôt à Baie-Saint-Paul, petite ville de la région de Charlevoix au Québec. Soutenu par le gouvernement du Québec, c’est en 1984 que le Club des talons hauts - second nom de la troupe - devient le Cirque du Soleil, à l’occasion du 450e anniversaire de la découverte du Canada par l’explorateur Jacques Cartier. Un Cirque réinventé (nom de leur spectacle à succès monté à Los Angeles en 1987) : voilà ce que propose alors cette troupe prometteuse. Dès les premiers spectacles, le cirque se distingue par l’absence d’animaux et l’accent mis sur les acrobaties et le théâtre. Tout va très vite pour la compagnie, qui bouleverse complètement l’approche traditionnelle du cirque et ouvre la voie à son évolution. Au fil des années, les spectacles du Cirque du Soleil dépassent les frontières canadiennes jusqu’au Japon ou à l’Europe, en passant par les États-Unis où la troupe s’impose dès la fin des années 1980. Ses nombreuses créations (Totem, Ovo, Kurios...) bourlinguent de par les mers et océans ou sont présentés à l’année (Las Vegas, Orlando, Riviera maya). Une audace et un génie que Las Vegas a toujours accueillis à bras ouverts : en 1993, le show à succès Mystère s’installe de façon permanente dans une salle réservée de la fameuse ville aux néons. De multiples productions se sont depuis imposées de façon durable dans le paysage du divertissement de la Sin City, dont Michael Jackson One (2013), hommage époustouflant au roi de la pop. Début 2020, Guy Laliberté a vendu ses dernières parts de la société au trio qui en détenait déjà la majorité : des groupes américains et chinois (TPG et Fosun), et la Caisse de dépôt et placement du Québec. L’entrepreneur visionnaire, qui a fondé la société Lune Rouge, continue de présenter des projets créatifs, dont PY1, imposante pyramide installée en plein Vieux-Port de Montréal à l’été 2019, avant de partir en tournée mondiale. Elle accueillait un spectacle multimédia immersif et des soirées DJ thématiques. Depuis son rachat, le Cirque a quelque peu perdu de sa superbe et il s'est heurté à des problèmes de surendettement considérables. Et la crise causée par l’épidémie de Covid-19 au début de l’année 2020 n'a rien arrangé à cela. le Cirque s'est vu contraint de mettre temporairement à pied 95 % de son personnel et de suspendre toutes ses représentations (soit 44 spectacles dans le monde !). Le gouvernement québécois a apporté un soutien financier à cette société emblématique en avançant quelque 200 millions de dollars... Des nouveaux investisseurs ont également permis à la compagnie de continuer à diffuser son art dans le monde avec des spectacles inédits!
Montréal, terre d’accueil de nombreuses compagnies
Autre figure de proue du cirque contemporain québécois, le Cirque Eloize a aussi bien grandi depuis sa création en 1993. La compagnie présente plusieurs spectacles, fixes ou en tournée.
Musique, danse, technologies et théâtre se mêlent aux arts du cirque dans un univers poétique. Pour l’anecdote, c’est à l’un de ses membres fondateurs que l’on doit la roue Cyr, du nom de son inventeur, qui a fait son apparition en 2003, ouvrant le champ des possibles des acrobates ; on peut notamment voir un numéro de roue Cyr dans le spectacle Corteo du Cirque du Soleil et cette discipline est désormais enseignée à l’Ecole Nationale de Cirque (ENC). Les studios de la compagnie sont installés dans l’ancienne Gare Dalhousie (Vieux-Montréal) et ouvrent leurs portes aux artistes de la relève.
Plus jeune, la compagnie Les 7 Doigts de la Main est née en 2002, à l’initiative de sept circassiens nourris par leur précieuse expérience artistique. Outre ses créations originales, dont le mémorable Vices & Vertu, conçu dans le cadre des célébrations du 375e anniversaire de Montréal, ou Passagers, en tournée depuis, la compagnie participe également à des projets collaboratifs. En 2018, Les 7 Doigts ont inauguré leur centre de création et de production en plein Quartier des spectacles à Montréal.
Un dernier pour la route : le Cirque Alfonse, qui a vu le jour dans la région de Lanaudière, non loin de Montréal, célèbre ses racines québécoises dans tous ses spectacles, de La Brunante (terme québécois désignant le crépuscule) en 2006, à TABARNAK (le ton est donné !), en tournée mondiale.
La TOHU et la Cité des arts du cirque
Depuis sa création, à la fin des années 1990, la Cité des arts du cirque s’est imposée comme un lieu incontournable de la vie du cirque à Montréal. Installée dans le quartier en pleine mutation de Saint-Michel, c’est un point de rencontre entre artistes, enseignants, élèves, metteurs en scène, producteurs, etc. La TOHU est la vitrine de cette Cité. Son impressionnante salle circulaire, unique en Amérique du Nord, rappelle les chapiteaux de cirque traditionnels et accueille, entre autres, les représentations des élèves de l’ENC. Chaque mois, des expositions et des événements sont organisés à la TOHU, ou dans le parc Frédéric-Back voisin.
La Cité accueille le siège social des entités qui l’ont imaginée : le Cirque du Soleil, qu’on ne présente plus, mais aussi l’École Nationale de Cirque et En Piste, deux autres grands acteurs œuvrant pour le développement du cirque au Québec, au Canada, et dans le monde.
Lorsque l’École Nationale de Cirque est fondée en 1981, c’est la première école de cirque professionnelle en Amérique du Nord. Aujourd’hui, elle propose une formation complète, des cours préparatoires au diplôme d’études supérieures, en passant par le programme cirque-études. Elle forme également des enseignants des arts du cirque. Le diplôme, délivré par le ministère de l'Éducation et l’Enseignement supérieur du Québec, est un gage de reconnaissance de ces arts. Jouissant d’une renommée internationale, l’ENC compte plus de 150 étudiants de tous horizons.
En Piste, regroupement national des arts du cirque, a pour mission de réunir tous les acteurs du secteur et de veiller à l'épanouissement de ce milieu artistique, notamment par sa promotion auprès du public, mais aussi des instances gouvernementales, entre autres. Et En Piste peut se réjouir de belles victoires puisque le Conseil des arts et lettres du Québec (CALQ) a reconnu les arts du cirque comme un art à part entière en 2001, suivi du Conseil des arts de Montréal (2008) et du Canada (2009).
Quand Montréal devient complètement cirque…
Fruit de la collaboration entre la TOHU, le Cirque Eloize, les 7 Doigts de la main, le Cirque du Soleil, l’École Nationale de Cirque et En Piste, Montréal Complètement Cirque est le premier festival international dédié aux arts du cirque sur le continent nord-américain. La programmation est haute en couleur : divers spectacles, payants ou gratuits, sont présentés dans des salles et dans les rues de la ville, comme la représentation quotidienne désormais emblématique qui se tient chaque jour sur la place Émile Gamelin du Quartier des spectacles. Si une large place est accordée au cirque québécois, de nombreuses compagnies postulent aussi chaque année pour participer au festival. En marge des spectacles, des activités sont organisées pour tous, notamment par l’École de cirque de Verdun, au centre-ville, mais aussi dans plusieurs quartiers résidentiels, afin que toute l’Île de Montréal profite de la fête.
Après l’annulation de tous les festivals de l’été 2020 à Montréal, l’équipe de Bonheur mobile – formée de membres des compagnies Cirque Alfonse, FLIP Fabrique, Patin libre et Les Parfaits Inconnus – fait un beau pied de nez à la pandémie en organisant, dès le début du confinement, des performances surprises dans les ruelles d’Hochelaga-Maisonneuve.
Par ailleurs, la rue Saint-Denis, qui accueille habituellement plusieurs prestations dans le cadre du festival Montréal Complètement Cirque, devient en juillet 2020 le plateau de tournage d’une série de courts métrages sur le cirque : Au hasard de la ville. Réalisés par la metteuse en scène et actrice Brigitte Poupart, ils mettent cet art à l’honneur en présentant des numéros de trampoline, de planche coréenne, de jonglerie et de roue Cyr, entre autres. La série a aussi pour vocation de montrer l’architecture urbaine du Quartier des spectacles sous un angle différent.
Les prestations presque improvisées de 2020 témoignent bien de l’effervescence et du dynamisme du monde des arts du cirque à Montréal. Depuis 2021, le festival a retrouvé le public en bonne et due forme et continue de faire vivre Montréal comme capitale du cirque.