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Une exception anglaise

La monarchie britannique est l’une des plus anciennes d’Europe. Perçue comme le symbole de l’Angleterre, la reine et sa famille restent pour les Anglais un point de repère inébranlable : les gouvernements changent, les Premiers ministres se succèdent, la reine reste. Les membres de la famille royale, gardiens de l’histoire du pays et de son héritage, sont des icônes de la culture britannique : la reine Victoria, dont le règne a permis la transformation de Londres et de ses rues, Lady Diana et son tragique accident, et bien sûr Elisabeth II, clef de voûte de la famille royale. Au trône depuis 67 ans, son règne est le plus long de l’histoire britannique. Princesse lors de la Seconde Guerre mondiale, elle a vu depuis défiler plus de 13 Premiers ministres, notamment Churchill. Les Anglais vivent dans la peur de l’annonce de son décès, qui sera un événement sans précédent pour le Royaume-Uni. Elle est aussi l’icône du Commonwealth, ce lien symbolique fort entre l’Angleterre et ses anciennes colonies. S’intéresser à la famille royale, c’est forcément passer par Buckingham Palace, le château de Windsor où se sont mariés Harry et Meghan, mais aussi le Kensington Palace, résidence officielle de Kate et William, l’abbaye de Westminster, église des couronnements, la cathédrale Saint-Paul où fut célébré le mariage de Lady Di et du prince Charles, la Tour de Londres où se cachent les joyaux de la Couronne ou encore les jardins royaux, Kew Gardens... autant de lieux emblématiques où l’on peut prétendre vivre comme l’un d’eux, le temps d’une visite…

Une inépuisable source d’inspiration

Que l’on soit français ou britannique, nul ne peut échapper à la famille royale : que ce soit à travers les produits dérivés, la visite des lieux touristiques, les tabloïds qui regorgent d’anecdotes à son sujet, les films et les séries historiques ou même l’achat de robes copiées sur celles des princesses. La famille royale dope le tourisme à Londres et au Royaume-Uni, et l’économie du pays par la même occasion. Des Anglais expatriés reviennent pour chaque événement royal, des touristes du monde entier se rendent à Londres attirés par cette monarchie singulière et ses lieux emblématiques. Le nombre de séries, de documentaires et de films sur le sujet (Le Discours d’un roi, triomphe aux Oscars 2011, La Favorite, film le plus nommé aux Oscars 2019, The Queen de Stephen Frears, Elizabeth avec Cate Blanchett...), montre la fascination que suscite encore et toujours cette famille, et les possibilités économiques qui en découlent.  Netflix a su flairer le filon avec sa série The Crown, retraçant les premières années du règne d’Elisabeth II. Le géant américain du streaming a investi 130 millions de dollars pour les 10 premiers épisodes, preuve qu’une production sur le sujet est systématiquement vouée au succès. Netflix a surfé sur le goût pour les drames historiques comme Downton Abbey, retraçant l’histoire d’une famille de l’aristocratie britannique. Après six saisons réussies, un film voit le jour en 2019, avec pour intrigue la venue du roi George V et de la reine Mary dans la célèbre demeure de Downton, ainsi qu'un tome 2 en 2022 !

Une présence médiatique exceptionnelle

C’est notamment grâce à une communication exemplaire que ses membres sont devenus extrêmement populaires. Précurseurs des influenceurs, ils savent parfaitement jouer du pouvoir d’identification. Sur les réseaux sociaux ils renvoient une image ouverte, proche du peuple, publiant des images de leur vie quotidienne ; parfois avec humour, à l’image de la reine portant un chapeau aux couleurs de l’Europe lors de son discours pour annoncer le Brexit. Ils font participer les Anglais aux choix de leur famille : lors de la grossesse de Meghan Markle, des bornes numériques dans les rues de Londres permettaient aux gens de voter pour deviner le sexe de son premier enfant.

L’histoire de la famille royale est intimement liée à celle des médias. La sphère médiatique, la communication et le marketing ont joué un rôle fondamental dans l’acceptation de la famille. La popularité d’Elizabeth II peut être expliquée par l’essor des médias et de la télévision. Sa cérémonie de couronnement, la première à être diffusée, fut suivie en 1953 par plus de 100 millions de téléspectateurs. Depuis, les chiffres d’audience des cérémonies royales n’ont fait qu’augmenter : 750 millions pour le mariage de Lady Diana et du prince Charles en 1981, 2 milliards pour celui de Kate et William en 2011 ! Une offre insolite, mais officielle, a même parcouru la toile : à 93 ans, la reine Elizabeth II cherchait un community manager pour gérer les 6,6 millions d’abonnés pour le compte Instagram de la Royal Family et les 10 millions pour les comptes de William et Kate et de Harry et Meghan. Ces réseaux mettent surtout en avant la nouvelle génération et nourrissent l'English Dream, incarné par Lady Diana hier, et aujourd’hui par Kate Middleton et Meghan Markle, surnommée la « Lady Diana 2.0 ».

The English Dream et la réalité

Depuis la figure emblématique de Lady Diana, on s’attache surtout à la famille royale par le biais des femmes, ces outsiders qui parviennent à intégrer cette famille de rêve. Dans les années 1970, plus personne ne s’intéressait à la monarchie britannique, jugée vieillotte. Un coup médiatique de maître est alors opéré grâce au mariage du prince Charles avec une femme ordinaire devenue princesse, qui incarne le mythe de My Fair Lady, de Cendrillon ou de Pretty Woman. Lady Diana donnait un visage humain à la famille royale. Sa mort fut un choc pour le monde entier et plus de 3 millions de personnes se rendirent à ses funérailles. Palais, richesse, beauté, baisers sur un balcon... La famille royale devient l'incarnation de l’image romantique par excellence, le conte de fée des temps modernes.

Cependant, cette tendance est en train de s'inverser, avec les nouvelles générations princières, beaucoup moins enclines que les précédentes à accepter des traditions vieillottes et rigides sans moucher. En 2020, le couple Harry et Meghan fait le buzz en décidant de sortir de la famille royale, une décision surnommée le Megxit. Leur choix fit l'objet d'une polémique énorme et pendant plusieurs semaines, ils firent la une de tous les journaux. Cependant, loin d'en avoir fini avec la famille royale, le couple accorde une interview à la présentatrice américaine Oprah Winfrey en 2021. Dans une vidéo devenue virale, ils se confient sur les pressions qu'ils ont subies au sein de la famille royale et sur les remarques racistes auxquelles Meghan a dû faire face. Ces accusations défrayent la chronique et poussent la famille royale à se remettre en question et à se justifier. Désormais, tout le monde retient son souffle dans l'attente de la publication des mémoires de Harry, prévue en 2022, qui sont apparemment plutôt amères... À suivre !