Une isolation bénéfique
La flore réunionnaise est beaucoup plus endémique que sa faune, somme toute assez limitée. Vivant en vase clos depuis des millions d’années, l'île a développé une flore unique, à laquelle s’est ajoutée toute la diversité d’une flore importée : fleurs, fruits, légumes, épices, plantes à parfum… du monde entier, au point que certaines régions sont de véritables jardins botaniques. La flore originelle compte environ 550 espèces de plantes à fleurs dont 160 endémiques. Partout, les couleurs explosent et les senteurs embaument l'air, notamment dans le Sud sauvage et dans l’Est, où des cascades de fleurs multicolores dévalent les falaises. Les forêts de fougères des Hauts, parées de toutes les nuances de vert et noyées dans le brouillard, obligent au mysticisme, tandis que l’abondance des vergers de fruits exotiques, de cocotiers, de filaos veillant sur les vaguelettes du lagon incitent à la volupté… Petit indice pour connaître l’origine d’un arbre : dans le langage courant, les Réunionnais utilisent « bois de » pour désigner une espèce endémique et « pied de » pour une espèce exotique.
Des fleurs pour tous les goûts
Comme dans toutes les îles tropicales, les fleurs font partie du quotidien et embellissent les jardins et les places publiques. On ne présente plus les hibiscus, qui peuvent prendre plusieurs couleurs, les frangipaniers et leurs fleurs blanches et jaunes qui s’éparpillent sur le sol. Le flamboyant, que l’on voit sur beaucoup de cartes postales, fleurit au début de l’été et annonce joyeusement Noël avec des centaines de petites fleurs rouge vif. Il existe de nombreuses variétés d’orchidées, dont la vanille, mais que nous avons placée plus bas avec les plantes à parfum. Mentionnons également les bougainvillées, jacarandas, grevilleas…
Les forêts des Hauts
Plus on monte dans les Hauts, plus on remonte le temps. La nature a développé à la Réunion au fil des millénaires des espèces extrêmement rares de bois de couleur et de fougères arborescentes. Dans les forêt de Bébour ou de Bélouve et dans les cirques, ces forêts humides et brumeuses poussent au rythme incroyablement lent de la nature, et n’ont pas changé depuis l’arrivée de l’homme. Sachant qu’un arbre de bois rouge pousse durant plusieurs siècles, on s’imagine l’enchevêtrement indescriptible de lianes, de branches et de racines qu'il forme, le tout surmonté d’un couvert végétal opaque. Cette jungle qui grandit au ralenti résiste mieux aux cyclones. Le bois de fer est l’arbre le plus mythique : atteignant 15 à 20 m, son bois était parfait pour bâtir les charpentes car il est extrêmement solide, d’où son nom.
Les bords de mer
Deux espèces sont omniprésentes sur les bords de mer : le filaos (à prononcer « filao ») et le vacoa. Introduit sur l’île au XVIIIe siècle, le filaos est un épineux massif planté pour son bois. Aujourd’hui on le côtoie surtout sur la plage pour profiter de son ombre salvatrice et admirer ses racines mises à nue par l’érosion. Le vacoa (palétuvier en français) est présent sur les côtes rocheuses du Sud sauvage, du côté de Saint-Philippe. Il se reconnaît à ses racines aériennes et ses longues et épaisses feuilles vertes. Ses feuilles servent à la fabrication de paniers, chapeaux, sacs à dos (les fameux bertels) et ses racines sont bues en tisane pour soigner les rhumatismes. Le pain se mange quant à lui en salade, tandis que le cœur (chou de vacoa) se déguste en cari. Enfin, citons l’incontournable cocotier. À la Réunion, ses palmes sont utilisées pour le tressage, sa chaire pour le punch (un régal) et la noix coupée en deux fait partie des offrandes lors des rituels religieux tamouls.
Un garde-manger naturel
Grâce aux transports internationaux, vous connaissez certainement les bananes, mangues et papayes… Mais connaissez-vous vraiment les bananiers, les manguiers et les papayers ? Déjà, pour avoir de l’ombre, mieux vaut aller sous un manguier qu’un papayer ; quant au bananier, saviez-vous qu’on ne mange pas que ses bananes, mais aussi le bourgeon final, violet, appelé baba-figue ? Il y a aussi les zattes, les zevys, les jujubes, le fruit à pain, les caramboles, les letchis, les vavangues, les pêches qui poussent dans les cirques, le songe, les chouchous de Salazie, les lentilles de Cilaos, les tomates, les carottes. Sur cette terre bénie des dieux, tout pousse ! Se rendre sur les marchés est la meilleure façon de découvrir ces fruits et légumes souvent inconnus de nos rayons. La Réunion égrène aussi de nombreuses plantes au parfum recherché. Le géranium est très présent dans les Hauts de Saint-Paul, sur la route du Maïdo. Il a été introduit d’Afrique du Sud vers 1870. Pour obtenir 1 kg d’essence de géraniums, il faut distiller 300 kg de plantes. La Réunion était, en 1960, la première productrice mondiale d’essence de géranium. Mais le marché étant instable, la majorité des producteurs ont fini par se tourner vers la canne à sucre. Le vétiver pousse quant à lui entre 300 m et 700 m d’altitude dans le sud-est de l’île. L’essence du vétiver est sécrétée par ses racines très chevelues qui s’enfoncent jusqu’à 40 cm sous terre. Son essence est utilisée en parfumerie et en pharmacopée tandis que l’herbe elle-même était aussi utilisée pour les toits des cases ou pour le tissage des capelines et paniers.
Les tisaneurs
Bien que le nombre de tisaneurs diminue drastiquement depuis une vingtaine d’années, la consommation de tisanes reste une pratique quasi quotidienne et très en vogue chez les Réunionnais. Il y a les tisanes classiques, celles pour bien dormir ou pour la digestion, mais il y a aussi la tisane pour le mal de crâne, pour les douleurs musculaires, pour la tension, pour le diabète, pour soigner les infections et bien d’autres. Ici les plantes sont maîtrisées et mélangées selon le résultat escompté. Les locaux tentent bien souvent de se guérir eux-mêmes par les méthodes traditionnelles, avant de se tourner vers le médecin.
Des espèces aujourd’hui disparues
Si l’île était vierge de toute population autochtone lors de sa découverte, les récits des marins français, anglais ou hollandais ont révélé l’existence d’espèces animales aujourd’hui disparues. Parmi elles la star est bien sûr le dodo ou dronte. Ce gros volatile peu gracieux et incapable de voler aurait disparu au début des années 1700, victime des hommes mais aussi des attaques des chiens et des rats sur ses œufs. À noter toutefois que des ossements ont pu être trouvés à Maurice mais pas encore à la Réunion. D’autres espèces imposantes étaient présentes sur la côte ouest, telles que les aigrettes, le flamant rose de Madagascar ou l’ibis, mais aussi la tortue terrestre que l’on retrouve aux Seychelles et à Maurice, et de grosses anguilles qui habitaient les rivières. Une faune diversifiée qui a été petit à petit décimée par les passagers de navires en escale, mais aussi par les maladies, rongeurs et insectes clandestins qu’ils transportaient avec eux. Du côté de la flore, la mise en culture des Bas et des mi-pentes, ainsi que l’aménagement de zones habitables dans les Bas ont considérablement changé le paysage, remplaçant les forêts de benjoins et de lataniers par des espèces exotiques.
Une faune marine exceptionnelle
Qui dit île dit palmes, masque et tuba ! La Réunion ne fait pas exception, encerclée par l’océan Indien, elle a pour avantage de présenter deux milieux marins très distincts : le milieu océanique ouvert et très profond (jusqu’à 4 000 m) et le milieu lagunaire le long des côtes ouest, délimité par la barrière de corail. L’accès au grand large est extrêmement réglementé depuis le début de la crise du requin : vous ne pourrez vous mettre à l’eau qu’en compagnie de prestataires touristiques agréés qui vous emmèneront à la rencontre des dauphins et des baleines ou en plongée, l’idéal pour observer les barracudas, les balistes et les tortues. Le large est aussi le domaine de la pêche au gros, avec la présence de grandes espèces prédatrices telles que le marlin, le thon, la daurade coryphène ou encore l’espadon, que l’on retrouve avec plaisir dans nos assiettes. Côté lagon, les poissons y sont, pour notre plus grand plaisir, colorés, aux formes incongrues, multiples et surtout peu farouches. À l’intérieur du lagon, le principal animal présent est, bien entendu, le corail ! C’est le squelette du petit animal qui se tasse au fur et à mesure des années pour former les barrières de corail. À l’instar des poissons, le corail se présente sous de multiples formes et multicolore, un régal pour les yeux.
La protection des tortues marines
À la Réunion, la tortue est représentée par Kélonia. Ce musée régional situé à l’entrée de Saint-Leu est aujourd’hui l’un des rares endroits où vous pourrez encore observer des tortues, outre les sorties de plongée, et, si vous êtes extrêmement chanceux, le lagon au coucher du soleil. Lieu d’accueil pour les tortues blessées, Kélonia a sonné l’alerte : les tortues disparaissent petit à petit. Si on connaît bien désormais les problèmes qu’elles rencontrent en mer (braconnage, ingestion de plastique en quantité, accidents dans les filets de pêche), on connaît moins leurs problèmes sur terre. En effet, bien que marines, les tortues vertes et tortues imbriquées pondent sur les plages. La ponte comme l’émergence des bébés sont des opérations longues et périlleuses. Sauf qu’à la Réunion, la place sur la plage est rudement concurrencée par la présence des hommes qui se sont appropriés ces espaces jour et nuit, les privant de leur intimité et, de fait, de leur multiplication. Grâce aux efforts de Kélonia, des tortues soignées sont désormais relâchées chaque année pour reprendre le large, et quelques plages dont on taira le nom sont réservées et surveillées pour la ponte.
Une faune terrestre discrète
La plupart des espèces terrestres présentes à la Réunion ont été amenées pour la chasse : tangues, cerfs de Java, lièvres, cailles, perdrix, cabris… Elles se font donc très discrètes et il est peu commun de les voir. De plus, la plupart n’ayant pas de prédateurs naturels autre que l’homme et vivant sur un petit territoire, elles ont choisi de développer un art du camouflage plutôt qu’une taille et des crocs imposants. Le prix du plus mignon et du plus facile à observer, selon la période de l’année, reste le tangue. Importé de Madagascar, ce petit animal semble être le mélange entre un hérisson pour le corps et une musaraigne pour la tête, avec une couleur de marcassin pour les bébés. Hibernant pendant l’hiver austral, le tangue pointe son nez quand la chaleur revient, et vous pourrez l’admirer, parfois un brin vaseux après longue sieste, sur les sentiers de randonnée. La mère est souvent suivie d’une dizaine de petits qui se dispersent au moindre bruit, car ils sont chassés pendant une bonne partie de l’année (et braconnés sur l’autre). Eh oui, tradition oblige, cette petite boule de piquants finit elle aussi en cari. Sa viande très forte est paraît-il très goûteuse, à condition d’oser la manger, cela va de soi.
Des oiseaux à protéger
Sur l’île, les oiseaux sont très appréciés et de nombreuses actions sont menées pour les protéger. Souvent de petite taille, n’ayant pas besoin de grandes ailes pour couvrir un petit territoire, ils ont trois prédateurs omniprésents : les rats qui mangent leurs œufs, les chats sauvages et l’homme. Une opération phare est menée chaque année pendant un mois à partir de mi-avril : les nuits sans lumières. La plupart des villes éteignent alors les éclairages publics pour aider les jeunes pétrels de Barau et les pétrels noirs, espèces endémiques de la Réunion, à quitter leurs nids et s’élancer vers la mer sans être attirés par la pollution lumineuse des villes. Parmi les plus spectaculaires on peut citer le paille-en-queue, emblème de l’île et présent dans tout l’océan Indien. Sa longue queue blanche permet de le distinguer facilement et il niche la plupart du temps dans les falaises qui bordent le littoral. Seul rapace de l’île, le papangue est un oiseau endémique. Disparu sur l’île Maurice, il resterait environ 200 couples à la Réunion. Le bélier est le petit oiseau jaune fort bruyant qui tisse des nids en paille accrochés aux branches d’arbres, une vraie merveille architecturale, mais ne garez pas votre voiture dessous. Le cardinal arbore, lui, une belle tunique rouge. Le tec-tec est celui qui vous accompagnera sur les sentiers et enfin le tuit-tuit est le plus menacé, il n’en existe plus que quelques couples sur le massif de la Roche Écrite, dans les plaines des Chicots et d’Affouches.