shutterstock_1465664327.jpg
shutterstock_1758935471.jpg

Dolmens, menhirs et stèles : le mégalithisme corse

Les mégalithes sont des monuments préhistoriques composés de pierres massives isolées, comme les menhirs, ou agencées pour former des ensembles, comme les dolmens. Ce phénomène apparaît en Corse dès les premières occupations humaines, et se développe particulièrement au cours du IIe millénaire avant notre ère, notamment en Sartène, sur le plateau de Cauria. La star de ce site est le dolmen de Fontanaccia : avec ses 2,60 m de long et 1,80 m de haut, pesant plus de 15 tonnes, c’est le mégalithe plus connu et le mieux conservé de l’île.

Les dolmens (aussi appelés tole, stazzone ou casarone) sont surnommés en Corse-du-Sud « table du péché » ou encore « forge du Diable ». On en trouve un bel exemple sur la commune de Santo-Pietro-di-Tenda : le dolmen du Monte-Revincu. Les alignements de menhirs (stantare, petre arriti, pile, petre longhe, colonne) sont quant à eux appelés populairement cimiteri d’i Turchi ou d’i Mori (cimetières des Turcs ou des Maures). Après une courte marche dans la nature, on peut admirer un ensemble représentatif au col de Pinzu, à Vergine.

L’île présente par ailleurs des statues-menhirs, c’est-à-dire des pierres portant sur leur face des représentations – ce que certains chercheurs affirment être une spécificité insulaire. À l’inverse des autres mégalithes, elles sont perçues de manière positive, parfois même considérées comme protectrices. On en trouve de beaux exemples à Filitosa, l’un des sites les plus célèbres de l’île en la matière. Occupé depuis plus de cinq millénaires, ce site témoigne des différentes occupations humaines du Néolithique jusqu’au Moyen Âge.

Cucuruzzu, témoin de l’âge de bronze et du Moyen Age

Cucuruzzu est un site monumental de l'âge du bronze (IIe-Ier millénaires avant notre ère) situé à 700 mètres d’altitude sur le plateau de Levie, dans la région de l'Alta Rocca. Restauré en 1991 par l’État, il est depuis lors accessible au public et témoigne d’une période dont il ne reste que peu de traces. Il montre aussi comment des éléments appartenant à diverses époques peuvent être amenés à cohabiter voire à se mélanger, formant des ensembles curieux.

Après une courte marche à travers une forêt méditerranéenne préservée, on y trouve le casteddu de Cucuruzzu, qui fait partie d’un ensemble d’une vingtaine de monuments similaires découverts en Corse (Araghju, Cuntorba, Foce et Balestra, Torre, Tapp, etc.). Ces bâtiments, à la fois refuges et greniers communautaires, servaient comme points de contrôle des territoires. À quelques mètres du casteddu de Cucuruzzu, on accède à la fortification de Capula, un bâtiment datant du Moyen Âge au pied duquel une statue-menhir a été réutilisée dans la maçonnerie médiévale.

À 7 km environ du site archéologique, le musée de l’Alta Rocca rassemble des collections issues des fouilles menées sur le site mais aussi dans le reste de la région. On peut y découvrir des objets issus des cultures qui s’y sont succédé depuis le VIIIe millénaire av. J.-C. jusqu’au Moyen Âge, ainsi que l’un des vestiges humains les plus anciens de Corse : la Dame de Bonifacio ou « doyenne des Corses ».

Aleria et Mariana, anciennes cités antiques

Alelia est fondée par les Phocéens en 565 av. J.-C. puis reprise par les Romains à partir de 259 av. J.-C. pour devenir Aleria, bien que les vestiges attestent d’une occupation humaine depuis le VIe millénaire avant notre ère. Elle constitue avec Mariana l’une des plus grandes agglomérations romaines de l’île. Ces ruines romaines sont décrites pour la première fois par Prosper Mérimée en 1840, après son voyage d'inspection en Corse. Mais ce n’est que dans les années 1950 que sont entreprises les premières fouilles d’ampleur, au cours desquelles sont mis au jour le forum et une partie de l’agglomération.  Aujourd’hui, on peut également admirer deux temples, deux thermes et plus de dix citernes. Par ailleurs, on peut découvrir de nombreux objets issus des fouilles au musée départemental d’archéologie situé à proximité du site.

La cité de Mariana, en Haute-Corse, est légèrement plus récente : elle est fondée au Ier siècle av. J.-C. par le général Caïus Marius. Située sur le littoral est de l’île, elle constitue alors un point stratégique pour le contrôle des routes commerciales maritimes et sert d’interface avec l’intérieur des terres. La ville s’étendait sur environ une vingtaine d’hectares et rayonnait sur tout un territoire composé de zones funéraires, de deux nécropoles (Murotondo-Palazzetto et I Ponti), d’établissements agricoles sur la commune de Lucciana et d’une zone portuaire à l’embouchure du Golo. Les ruines que l’on peut observer aujourd’hui, datant des Ier, IIe et IIIe siècles après J.-C., se situent au sud de la cathédrale Canonica. Elles représentent environ un dixième de l’ancienne cité et sont réparties de part et d’autre d’une voie qui participait au plan orthonormé caractéristique des villes romaines. Le sol de certaines habitations notables est orné de belles mosaïques. À côté du parc archéologique ouvrira bientôt un musée abritant les collections d’objets découvertes au cours des fouilles.

L’archéologie corse, un domaine d’avenir

La richesse actuelle de la Corse en termes d’archéologie laisse à penser que beaucoup d’autres surprises nous attendent. À chaque nouveau programme d’aménagement, des trouvailles sortent de terre. Par exemple, fin 2019, dans le cadre de travaux d’archéologie préventive, a été mis au jour un site antique dans les hauteurs de Bastia. C’est une première dans l’agglomération, d’autant plus excitante qu’il s’agit de vestiges d’une période charnière ayant eu un rôle majeur dans l’histoire de l’île, mais sur laquelle nous n’avons que peu d’informations : la fin de l’époque romaine, entre le IVe et le VIe siècle après Jésus-Christ. Il s’agit de deux unités d’habitation, dont l’une bourgeoise, unique en son genre et très bien conservée. On espère que le site deviendra un jour accessible au public !